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L’IA et l’adaptation locale : un antidote essentiel au chaos climatique


De la traduction automatique à la détection des cellules cancéreuses, en passant par la promesse des voitures autonomes, l’intelligence artificielle (IA) transforme déjà le travail et les processus dans de nombreux domaines de la vie. Mais cette révolution, qui ne fera que s’intensifier dans les années à venir, concerne aussi les services publics, et en particulier les gouvernements locaux et régionaux.

Cela est particulièrement vrai dans le domaine de l’adaptation au changement climatique, étant donné que les risques météorologiques sont aussi divers que le patchwork des territoires mondiaux. C’est pourquoi le CEMR a organisé un débat politique sur l’IA et l’adaptation climatique à Bologne, le lundi 4 juillet, réunissant des dirigeants politiques nationaux, régionaux et locaux, ainsi que des experts académiques et internationaux.

Stefano Bonaccini, président du CEMR et de la région Émilie-Romagne, a souligné que Bologne accueille les superordinateurs du Centre européen pour les prévisions météorologiques à moyen terme (ECMWF). « Il s’agit d’un centre de données pour l’ensemble de l’Union européenne, contenant certains des superordinateurs les plus puissants du continent », a-t-il déclaré. « En prévoyant les risques météorologiques, le Centre contribue à façonner les actions locales et régionales les plus appropriées pour s’adapter à un climat de plus en plus instable. »

Ces données seront grandement nécessaires. Les territoires européens sont de plus en plus dévastés par les incendies de forêt, les inondations et autres phénomènes météorologiques extrêmes. Andreas Wolter, maire de Cologne, a rappelé que l’année dernière, des inondations en Allemagne et en Belgique ont causé près de 250 morts et infligé des dommages de 20 à 40 milliards d’euros. L’été 2021 a également été le plus chaud jamais enregistré en Europe, atteignant 48,8 degrés Celsius en Sicile en août.

Patrizio Bianchi, ministre italien de l’Éducation, a insisté sur l’importance de l’IA et des données pour développer des réponses locales, nationales et européennes au changement climatique et aux catastrophes potentielles. « Nous avons besoin de données, encore de données, et toujours plus de données ! Et de la capacité à exploiter ces données », a-t-il dit. « Nous utilisons ces données pour améliorer notre capacité à bien vivre et à rester en bonne santé, ainsi que pour éviter la guerre et les catastrophes. »

Le ministre Bianchi a souligné que le centre de données de Bologne est un maillon d’un système paneuropéen de simulations climatiques et que la coopération à tous les niveaux est essentielle. Il a aussi insisté sur le fait que l’IA ne peut remplacer l’intelligence collective humaine et la responsabilité civique : « Le seul vrai danger, c’est la stupidité humaine. Nous pouvons l’éviter en revenant aux valeurs fondamentales de nos démocraties. »

Action européenne et locale combinée

Les rapports du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) suggèrent de plus en plus que nous n’atteindrons pas l’objectif de l’Accord de Paris, qui vise à limiter la hausse globale des températures à 2 degrés Celsius. Par conséquent, l’adaptation climatique locale sera nécessaire en plus de la réduction des émissions globales.

L’Union européenne prend de nombreuses mesures pour anticiper et s’adapter aux risques climatiques. Parmi celles-ci figurent le programme d’observation satellitaire Copernicus, le modèle numérique Destination Terre de notre système environnemental planétaire, ainsi qu’une avalanche de législations et financements dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe.

Un projet européen particulièrement important pour les gouvernements locaux et régionaux est le Pacte des maires. Les villes et régions membres, au nombre de 11 000 signataires représentant 341 millions d’habitants, s’engagent toutes à prendre des mesures pour décarboner leurs économies et s’adapter activement au changement climatique.

L’organe scientifique de la Commission européenne, le Centre commun de recherche (JRC), produit régulièrement des études basées sur les données relatives aux risques climatiques locaux et à l’adaptation. Celles-ci aident notamment à identifier les actions les plus cohérentes et efficaces à mener dans différentes localités, tout en mettant en lumière des questions parfois négligées, telles que les inégalités sociales.

Les données publiques et les modèles sont clés pour concevoir des adaptations locales efficaces

Enrico Biffis, professeur associé en finance actuarielle à l’Imperial College de Londres, a insisté sur l’importance des données et de modèles climatiques précis pour prendre les mesures d’adaptation locale les plus pertinentes. « Si nous ne faisons pas cela correctement, les coûts seront énormes. Certains de ces projets s’étendent sur plusieurs années, 10, 20, 30 ans », a-t-il expliqué. « On ne peut pas revenir en arrière dix ans plus tard. Il est impératif de bien faire les choses dès le départ. »

Des maires et autres élus locaux et régionaux ont partagé leurs expériences et défis concernant l’adaptation climatique. Michaël Quernez, maire de Quimperlé, vice-président de la Bretagne et secrétaire général de l’association française du CEMR (AFCCRE), a cité les problèmes de privatisation des données climatiques. « En France, pour qu’un maire comme moi puisse accéder aux données de Météo-France (un service public de prévision météorologique), il doit les acheter », a-t-il dit. « Que pouvons-nous faire pour garantir que ces données restent publiques et ne soient pas commercialisées ? »

C’est l’un des nombreux enjeux que les représentants locaux et régionaux peuvent soulever auprès des décideurs nationaux et européens. Une chose est sûre : nous avons besoin d’informations précises et d’une coopération à tous les niveaux si les Européens veulent lutter et s’adapter au changement climatique.