La Présidente von der Leyen : Il est temps que les municipalités et régions soient pleinement engagées dans la relance de l’Europe
Cet article a été initialement publié par Agence Europe.
Avec le lancement du colossal plan de relance NextGenEU, l’Union européenne espère accélérer les transitions numérique et écologique. Mais ces transitions ne pourront aboutir qu’avec les acteurs de terrain : les gouvernements locaux et régionaux. Il est grand temps que les municipalités et les régions soient pleinement impliquées dans la mise en œuvre et le suivi des plans nationaux de relance, condition indispensable pour garantir leur succès.
Ces deux dernières années ont révélé la vulnérabilité de nos sociétés et la nécessité d’affronter ensemble des menaces planétaires : la pandémie, le changement climatique, les catastrophes naturelles, mais aussi l’érosion de la démocratie et des droits humains.
En tant que représentants des gouvernements locaux et régionaux de toutes tailles, nous avons pu constater à quel point le niveau territorial est devenu le principal point de référence pour l’action publique en temps de crise. Les villes et régions ont fourni des services essentiels tout en limitant les ruptures : soins sociaux, gestion des déchets, assainissement, mobilité, santé… Elles ont aussi préparé le retour à la vie normale, en accueillant à nouveau les touristes, en organisant des événements culturels, en maintenant la qualité des services publics, et en assurant des conditions de travail sûres pour leurs agents.
Des finances locales fragilisées
Si la crise a confirmé le rôle central des collectivités, l’impact sur les finances territoriales a été dévastateur. Notre suivi montre un effet de ciseaux : une chute des recettes conjuguée à une explosion des dépenses, notamment en raison de la prise en charge sociale, de l’achat d’équipements de protection et du soutien aux entreprises et associations locales. En Allemagne, les municipalités et comtés font face à un déficit budgétaire de plus de 10 milliards d’euros.
Dans cette crise, l’UE a rapidement réagi en lançant un programme de relance de 800 milliards d’euros. Maintenant que la plupart des plans nationaux de relance et de résilience ont été approuvés par Bruxelles et que les fonds commencent à être versés, il est temps de penser à la suite.
Comment s’assurer que l’argent de l’UE soit bien utilisé ?
Pour nous, la réponse est claire : en impliquant pleinement les collectivités territoriales dans la mise en œuvre et le suivi des plans de relance. Les collectivités disposent du savoir-faire, de la connaissance du terrain et de la confiance des citoyens, autant d’atouts pour une gestion efficace.
Malgré les recommandations de la Commission européenne, la plupart des gouvernements nationaux n’ont pas suffisamment associé les collectivités locales à l’élaboration des priorités d’investissement.
Depuis, nous avons obtenu que les États membres soient tenus de rapporter leur niveau d’implication des territoires, mais cela ne va pas assez loin. Une évaluation approfondie de cette implication locale doit être une priorité lors de la revue à mi-parcours des plans de relance par la Commission, en 2022.
Adapter la relance aux besoins du monde rural
Les zones rurales représentent 80 % du territoire de l’UE. Elles abritent un patrimoine géographique, culturel et agricole considérable, ainsi qu’un fort potentiel touristique. Pourtant, elles sont souvent confrontées à l’exode et au déclin démographique. La crise pourrait accentuer ces fractures. Selon une consultation publique de la Commission, 56 % des habitants des zones rurales se sentent « laissés-pour-compte ».
Les plans de relance sont une occasion de revitaliser les zones rurales et les villes moyennes, à travers des investissements ciblés. Par exemple, la digitalisation et le développement du télétravail peuvent renouveler l’attractivité des territoires ruraux. Mais cela ne peut fonctionner qu’en impliquant les collectivités concernées, afin de garantir que les plans répondent à leurs besoins réels. 79 % des Européens estiment d’ailleurs que les dépenses publiques doivent tenir compte des spécificités rurales.
Les citoyens font confiance aux collectivités pour la transition écologique
Le Pacte vert européen lancé par la Présidente von der Leyen et les nouvelles propositions législatives sur le climat, l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables montrent que l’UE veut aller de l’avant. Mais aucun résultat concret ne sera possible sans les collectivités.
De Nantes à Constanța, d’Andalousie à la Laponie, nos villes, comtés et régions sont prêtes à mener les grandes transitions de ce siècle — à condition d’en avoir les moyens.
Au moins 37 % des dépenses des plans de relance doivent concerner le climat. Ici aussi, le rôle des territoires est décisif, notamment pour les politiques de mobilité ou d’efficacité énergétique. Selon un sondage Eurobaromètre, 43 % des citoyens considèrent que le niveau local et régional est le plus adapté pour lutter contre le changement climatique.
De nombreux dirigeants européens, y compris la Présidente von der Leyen, reconnaissent que les collectivités doivent être impliquées dans la relance. Il est maintenant temps de passer des paroles aux actes : la Commission européenne doit s’assurer que les gouvernements locaux et régionaux soient pleinement intégrés au processus.
C’est la seule garantie que le programme de relance européen, l’un des projets les plus ambitieux de l’histoire de l’intégration européenne, soit un succès.
Frédéric Vallier, Secrétaire général du Conseil des Communes et Régions d’Europe (CCRE)

Conseillère principal – Gouvernance et relations institutionnelles