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Un appel à l’action : L’Europe ne peut réussir qu’avec ses communes


Le Dr Christoph Schnaudigel, co-président de l’Association allemande des comtés (Deutscher Landkreistag) et du CCRE (RGRE), vice-président de la section allemande du CCRE (RGRE), ainsi que président du comté de Karlsruhe, lance un appel fort à l’approche des dixièmes élections européennes au suffrage direct, prévues du 6 au 9 juin 2024.

Soulignant le rôle essentiel des municipalités européennes, il met en avant la nécessité d’une collaboration étroite entre les autorités locales et les institutions européennes pour répondre efficacement aux défis complexes auxquels l’Union européenne est confrontée. Parmi ces enjeux : l’agression russe en Ukraine, les crises énergétiques et migratoires, ainsi que les finances locales.

Il appelle également à un cadre réglementaire européen plus souple et moins contraignant, afin que les législations européennes tiennent compte des réalités et des capacités des collectivités territoriales. L’éditorial insiste également sur l’importance d’une politique régionale significative, appelant à ce que les fonds soient alloués selon les besoins locaux, dans le respect du principe de partenariat.

Un appel à l’action : L’Europe uniquement avec ses communes

Les dixièmes élections au suffrage direct du Parlement européen, qui se tiendront du 6 au 9 juin 2024, revêtiront également une grande importance pour les municipalités européennes. L’Union européenne (UE) et le monde continuent de faire face à des défis profonds auxquels les gouvernements nationaux ne peuvent répondre seuls de manière adéquate. Les effets de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine, les crises énergétique et migratoire et la pression sur les finances municipales s’ajoutent à des transformations économiques et sociales de grande ampleur telles que le Pacte vert et la numérisation.

Afin de relever ces défis de manière proactive, le Conseil des Communes et Régions d’Europe (CCRE) a adopté un « Appel à l’action » lors de son Assemblée générale à Prague en décembre 2023. Celui-ci formule des demandes pour une politique européenne municipale réussie, à l’attention des institutions européennes, des candidats et des nouveaux membres du Parlement européen.

En tant que l’association européenne la plus représentative des autorités locales et régionales, le CCRE rassemble depuis 1951 un million d’élus européens démocratiquement élus issus de 60 associations membres dans 40 pays. Sa mission est de construire une Europe unie, pacifique et démocratique, fondée sur l’autonomie locale, le principe de subsidiarité et une participation citoyenne appropriée.

Une participation accrue aux processus décisionnels européens : une meilleure réglementation pour et avec les autorités locales

Les autorités locales sont des acteurs publics économiques, sociaux et politiques importants, elles sont responsables du développement et de l’entretien des infrastructures locales, des soins de santé, de la gestion des déchets et des transports publics locaux. Ce faisant, elles appliquent directement les règlements européens en matière de marchés publics et de droit des aides d’État.

Cependant, les autorités locales ne se contentent pas de fournir des services publics essentiels. Elles et leurs associations représentatives construisent également un pont entre l’Europe et ses citoyens. D’une part, elles aident les habitants des comtés, des villes et des municipalités à comprendre l’importance de l’UE dans leur vie quotidienne, et d’autre part, elles communiquent et transmettent les intérêts et besoins locaux à l’UE et aux autres décideurs internationaux.

En raison de leurs responsabilités, les autorités locales sont confrontées à un grand nombre d’initiatives de l’UE. Cela s’applique actuellement en particulier au Pacte vert pour l’Europe. Le climat, l’énergie et l’environnement sont des domaines dans lesquels le législateur européen a été très actif ces dernières années et l’est toujours. Cependant, la réussite de la mise en œuvre d’un avenir climatiquement neutre dépend en grande partie du niveau municipal, qui est le plus proche des citoyens. Les autorités locales mettent déjà en œuvre environ 70 % de la législation européenne. L’aménagement du territoire pour les énergies renouvelables, la mise en œuvre de taux de rénovation obligatoires pour les bâtiments publics et la restauration des écosystèmes locaux en sont quelques exemples actuels.

Pour cette seule raison, les districts, les villes et les municipalités doivent être impliqués en temps utile dans le processus décisionnel au niveau européen. Les connaissances et l’expérience locales sont indispensables au processus législatif européen. Le modèle de gouvernance en partenariat en Europe, qui s’est déjà exprimé dans la politique de cohésion, est un instrument important pour obtenir des résultats inclusifs qui tentent au moins de prendre en compte de manière appropriée les besoins locaux.

Le prochain Parlement européen et la Commission devraient donc s’engager en faveur d’un programme politique qui intègre fondamentalement les conditions locales dans leurs décisions. Cela inclut, avant tout, le renforcement du principe de partenariat dans la politique de cohésion, ainsi qu’un examen rigoureux de la subsidiarité et de la proportionnalité des nouvelles directives et réglementations concernant les intérêts locaux et régionaux.
Il faut tenir compte du fait que le niveau local est déjà confronté à un niveau presque ingérable de surrèglementation et à la complexité des normes. Cette situation est encore aggravée par le manque de personnel et les faibles ressources financières dont disposent les autorités locales dans de nombreux endroits. En vue des futures nouvelles réglementations de l’UE, il convient donc de renoncer à une réglementation accrue et à une densité excessive de règles. Il sera essentiel de concentrer la législation européenne sur les grands enjeux pertinents pour le marché intérieur, pour lesquels les réglementations européennes apportent une réelle valeur ajoutée. En outre, les réglementations européennes existantes doivent être simplifiées et rationalisées, et les obstacles bureaucratiques éliminés.

Une politique régionale européenne qui génère une réelle valeur ajoutée sur le terrain !

Pour une politique régionale de l’UE significative et généralement reconnue, il est également nécessaire que les fonds soient utilisés en fonction des besoins. Cela suppose, à son tour, que les municipalités, en tant que niveau le plus proche des citoyens, soient impliquées de manière appropriée dans les décisions relatives aux objectifs de financement et aux mesures, conformément au principe dit de partenariat. Ce principe existe déjà, mais il est parfois interprété par les autorités administratives des États fédéraux de telle manière que les autorités locales ne sont qu’informées des décisions, sans y être associées. C’est pourquoi le CCRE s’engage à renforcer et à préciser les exigences liées à ce principe.

La participation des autorités locales de tous types et tailles apporte également des avantages au niveau européen en rendant visible la diversité du niveau local et en mettant en évidence les forces et les besoins existants. Elle permet l’élaboration de stratégies adaptées aux réalités locales, mieux à même de répondre aux préoccupations des autorités locales concernées. Les approches centralisées fondées sur le principe du « même modèle pour tous » doivent appartenir au passé.

En tant que CCRE, nous demandons donc également aux décideurs européens de respecter le principe de « ne pas nuire à la cohésion » lors de l’élaboration de nouvelles législations ou de la révision de celles existantes. Ce principe stipule essentiellement que les règlements européens ne doivent pas nuire au développement socio-économique des territoires, car cela annulerait les effets des financements. Par exemple, les autorités locales ne devraient pas être obligées d’effectuer des rénovations coûteuses de bâtiments existants sans disposer des fonds nécessaires.

Nous encourageons en outre la prochaine Commission européenne à nommer un Commissaire dédié au développement territorial, doté d’un mandat clair pour faire progresser la politique de cohésion stratégique et à long terme de l’UE. Une telle concentration de compétences pourrait notamment contribuer à établir des lignes directrices applicables aussi bien dans les grandes villes que dans les zones rurales. Le soutien parfois incohérent entre les zones urbaines et rurales doit être mieux coordonné, entre elles et avec les défis locaux. Nous appelons les nouveaux députés européens à mettre en place un intergroupe sur les services d’intérêt général, qui concentrera ses travaux sur l’amélioration des services publics locaux et régionaux.

Approches systémiques et outils innovants pour une meilleure coopération locale

Notre vision va toutefois au-delà du débat politique actuel ; elle inclut également des approches systémiques et des outils innovants pour promouvoir des sociétés locales équitables, inclusives et durables. Le Parlement européen doit soutenir la promotion des compétences numériques au sein des administrations locales. Le cadre de l’UE doit être développé en cohérence avec des services publics centrés sur les usagers, afin d’en améliorer la qualité et l’accessibilité pour nos citoyens.

Dans un monde de plus en plus interconnecté, un modèle de coopération internationale ouvert et responsable est indispensable. Plus que jamais, les évolutions internationales ont un impact concret sur notre manière de vivre ensemble au niveau local. Les décideurs européens doivent continuer à soutenir la coopération décentralisée, en tant qu’outil éprouvé pour promouvoir une coopération internationale inclusive et la démocratie.

Les partenariats municipaux et les jumelages jouent également un rôle important dans ce contexte. Ils favorisent les valeurs communes et contribuent à l’ouverture et à une meilleure compréhension entre les citoyens européens. Les instruments de financement destinés au travail en partenariat doivent continuer d’être mis à disposition des municipalités de manière décentralisée.

En résumé, les élections européennes de 2024 constituent une opportunité importante pour l’Association allemande des districts et le CCRE de plaider en faveur d’une Europe à l’écoute de ses voix locales. La mise en œuvre de notre « Appel à l’action » peut permettre au Parlement européen et à la prochaine Commission de créer les bases d’une Union européenne réactive et centrée sur les citoyens, au service de tous. Avec nos messages et recommandations communs, nous voulons façonner l’Europe ensemble.