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Younous Omarjee : « La mère des batailles, c’est la bataille budgétaire, et on ne gagnera pas seuls depuis le Parlement européen »Récemment élu Président de la commission du développement régional (REGI) au Parlement européen, Younous Omarjee nous fait part de ses préoccupations façe à des potentielles coupes budgétaires dans la politique de cohésion. 

En tant que Président de la Commission du développement régional nouvellement élu, quelle est la première bataille que vous comptez mener ?

rnLa bataille immédiate est d’agir pour un budget de la cohésion à la hauteur des ambitions posées et des attentes et des besoins de l’ensemble des régions d’Europe. Déjà, nous avions été échaudé par les propositions de la Commission européenne. Mais aujourd’hui les premiers scenarios budgétaires envisagés par le Conseil européen sont pour nous inacceptables. Le Parlement européen est bien décidé à ne pas accepter le sacrifice des politiques traditionnelles à commencer par celui de la politique de cohésion. Cette position que j’exprime est aussi exprimée par les rapporteurs de notre assemblée sur le budget pluri annuel de l’Union (CFP). Le Conseil doit bien mesurer notre niveau de détermination.

rnMa priorité centrale, en tant que président est donc de me battre pour que la future politique de cohésion demeure une politique clef de l’Union européenne, en capacité d’être un puissant soutien pour toutes les régions et collectivités d’Europe. 

Quelles seront les priorités de votre mandature ?
rn 
rnEn tant que nouveau Président, je veux aussi mettre au cœur des travaux de notre commission de nouvelles priorités. Tout d’abord, mieux en prendre en charge la lutte contre la pauvreté et notamment la pauvreté urbaine qui grandit partout en Europe et pas seulement dans les régions les moins développées.

rnBien sûr, la politique de cohésion doit accompagner les nouveaux objectifs de l’Union pour la transition énergétique. C’est un défi considérable pour les régions d’Europe, qu’elles soient centrales, périphériques ou ultrapériphériques. Sortir d’un modèle basé depuis la révolution industrielle sur le développement des énergies fossiles est une révolution. Les régions doivent être accompagnées, soutenues et j agirais pour que les instruments soient créés pour cet accompagnement. Mais je l’ai dit et le répète, les nouveaux objectifs assignés à la cohésion doivent être accompagnés de moyens nouveaux, additionnels à ceux existants déjà.

Voyez-vous d’un bon œil la mise en place d’un New Green Deal ?

rnJ’attends de connaitre les propositions concrètes de la Commission, une fois que celle-ci sera validée par le Parlement européen sur le New Green Deal. J’ai eu l’occasion déjà d’en discuter avec le Vice-Président Commissaire désigné Frans Timmermans pour insister sur le rôle des villes. Et je lui ai suggéré que nous travaillions ensemble sur la création d’un ambitieux programme européen pour le boisement et la végétalisation des villes. C’est un enjeu central de la lutte contre le réchauffement climatique. Des millions d’arbres sont à planter ou à replanter dans nos villes avec toutes les conséquences vertueuses. Voilà quelque chose d’enthousiasmant qui serait, j’en suis certain, largement soutenu par les citoyens européens.   

rnEnfin je prendrai des initiatives pour une véritable ambition européenne pour les îles. L’Europe est concentrée sur sa dimension continentale quand elle est pourtant aussi la première puissance maritime mondiale. Tout un champ politique s’ouvre avec les îles et les océans. 

Revenons sur la question budgétaire : quel est votre sentiment sur le processus de négociation sur le futur de la politique de cohésion ? 

rnJe crois toujours que la raison et le bon sens puissent l’emporter. Le Parlement reprend ces négociations ferme dans la défense des principes et animé d’un état d’esprit constructif. Nous souhaitons avancer dans des délais raisonnables qui ne généreront pas des difficultés pour les bénéficiaires des fonds. Mais nous ne céderons pas non plus à la précipitation. Et la bataille parallèle sur le budget pluriannuel ne sera pas sans lien non plus sur les trilogues concernant le règlement général des fonds, le FEDER, Interreg. 

rnLes négociations commencent tout juste sur le règlement commun, elles n’ont pas encore démarré sur le FEDER et Interreg. Nous nous lançons dans un travail fastidieux qui prendra quand même du temps. Il est trop tôt pour vous donner mon sentiment sur tous les points qui viendront en négociation, mais la position du Parlement européen votée en plénière est connue. Il n’est un secret pour personne que les conditionnalités macroéconomiques, la dimension partenariale des fonds, la concentration thématique, seront intensément discutées.

Comment le Parlement compte-t-il défendre sa position ?

rnMais je le répète, l La mère des batailles, c’est la bataille budgétaire. Et pour cette bataille-là, la mobilisation de tous est et demeurera jusqu’au bout nécessaire. On ne gagnera pas seuls depuis le Parlement européen. Les collectivités doivent se faire entendre et défendre avec force le budget pour la cohésion. Les fonds de la cohésion ne finissent pas sur Mars, ils finissent toujours dans une commune. Baisser la cohésion c’est baisser le budget et les capacités d’investissement dans toutes les régions et communes. 

En vue des élections municipales en France en mars 2020, n’avez pas peur que cet appel passer en second plan ?

rnCela devrait concerner tous ceux qui en France se lancent dans la bataille pour les municipales. J’attends de la France et du Président Macron un engagement fort à la hauteur de ce que ces fonds représentent pour nos régions. Le budget de la politique agricole commune et celui de la cohésion doivent être défendus avec la même énergie.

rnC’est pourquoi j’appelle toutes les collectivités à faire pression sur leur gouvernement national et au plus haut niveau de l’État pour que le budget de la cohésion soit défendu jusqu’au bout des négociations. Et je leur dis qu’ils peuvent compter sur moi. 

Certains états membres ont commencé à définir la mise en œuvre des fonds européens alors que les réglementations ne sont pas adoptées. Quel risque y voyez-vous dans la capacité du Parlement Européen à défendre sa position dans les négociations ?  

rnJe vois cela et je dis ceci : à ce stade, commencer ce travail c’est prendre le risque d’avoir à le faire deux fois. Surtout pour ceux qui voudraient de surcroît adopter la vision la plus restrictive possible du principe de partenariat.

rnLe Parlement européen a une position politique claire et exigeante. Elle sera défendue ligne à ligne. Le Parlement est co-législateur et a tout autant de poids que le Conseil. Que personne ne s’y trompe. Je préside l’ensemble des trilogues qui relèvent du champ de la cohésion et je puis vous assurer que cela aura que peu d’incidence sur notre volonté à défendre la position du Parlement. J’invite donc les États membres à faire preuve de prudence. La codécision sera respectée.

Que pensez-vous de la candidate au poste de Commissaire en charge du développement régional et des réformes ? 

rnC’est une bonne nouvelle que le Portugal, pays ami de la cohésion, qui a d’ailleurs deux régions ultrapériphériques, ait fait la proposition pour ce portefeuille. Madame Ferreira a toutes les qualités requises pour être Commissaire au développement régional. Je crois qu’elle a personnellement à cœur de défendre une cohésion forte, et gagnante pour toutes les régions d’Europe. Nous avons besoin d’une commissaire forte qui soit une voix pour la cohésion au sein du collège des commissaires. Ainsi que d’une Commissaire qui domine l’administration et qui non pas est dominée par elle. 

rnIl faudra aussi bien sûr durant ces cinq années qui viennent regarder plus loin et tracer les grandes lignes de la future politique de cohésion, celle d’après 2027.