L’eurodéputé Dragoș Pîslaru : « La Commission intensifie ses efforts pour amener les gouvernements nationaux à être plus ouverts, plus transparents et à impliquer les autorités régionales et locales »
Avec 750 milliards d’euros de prêts et de subventions, le plan de relance Next Generation EU constitue un acte historique de solidarité permettant à notre continent de faire face à l’impact dramatique de la pandémie de coronavirus, tout en accélérant les transitions numérique et écologique.
Depuis son adoption, plusieurs députés européens ont exprimé leur inquiétude quant au manque d’implication des gouvernements locaux et régionaux dans l’élaboration des plans de relance. Nous avons échangé avec Dragoș Pîslaru, eurodéputé et membre de la commission des affaires économiques et monétaires (ECON), pour comprendre quelles sont les initiatives concrètes du Parlement européen afin de garantir que les Plans nationaux de relance et de résilience (PNRR) intègrent pleinement les niveaux local et régional.
Quelles sont, selon vous, les principales priorités de la commission ECON pour les 12 prochains mois, en lien avec les gouvernements locaux et régionaux ?
Notre commission ECON a été très active, voire proactive pendant la pandémie. Le groupe Renew Europe a été l’un des premiers à saisir l’importance de créer de nouvelles ressources propres pour l’Union. Après l’adoption de la Facilité pour la reprise et la résilience, nous avons commencé à voir cet instrument comme un modèle amélioré de gouvernance économique. Le débat à venir le plus important, selon moi, est de repousser les limites actuelles de la gouvernance économique européenne, en tenant compte de la conception et du fonctionnement de la RRF.
La création d’un groupe de travail spécifique pour surveiller la mise en œuvre de la RRF est un outil important. Comment ce groupe se prépare-t-il à l’évaluation à mi-parcours de 2022 ? Comment éviter qu’elle ne se transforme en simple exercice administratif ?
Nous avons analysé en profondeur les plans soumis par la Commission européenne, organisé des échanges réguliers avec les experts en charge de la RRF pour questionner les mesures proposées pour chaque pilier. Nous avons aussi débattu du rôle des collectivités locales et de la société civile dans la conception et la mise en œuvre des plans nationaux. Plusieurs débats ont eu lieu en séance plénière, dont un spécifiquement consacré au dialogue entre gouvernements et citoyens dans le contexte de la RRF, et nous avons adopté plusieurs résolutions. Nous préparons désormais une nouvelle résolution pour formuler la position du Parlement lors de la revue à mi-parcours.
Êtes-vous confiant que le Dialogue sur la relance et la résilience avec la Commission permettra au Parlement d’avoir les informations nécessaires pour exercer pleinement son rôle de contrôle ?
Ce dialogue est extrêmement important, car il permet au Parlement de faire remonter ses conclusions, préoccupations et exigences au vice-président Dombrovskis et au commissaire Gentiloni. Il nous permet de comprendre les choix de la Commission sur des questions clés liées à la mise en œuvre de la RRF, et oblige cette dernière à être transparente. Mais surtout, ce dialogue a été conçu pour les citoyens : pour qu’ils puissent suivre par eux-mêmes ce que l’Union européenne fait des plans envoyés par leurs gouvernements nationaux.
Il y a un an, la Présidente von der Leyen affirmait que les collectivités locales et régionales devaient être au cœur de la relance. Quel conseil donneriez-vous aux membres du CCRE souhaitant jouer pleinement leur rôle pour garantir que les fonds soient bien ciblés et utilisés efficacement ?
Je tiens à remercier les membres du CCRE pour leur rôle et leur aide dans la conception de la Facilité. J’ai reçu de nombreuses demandes des autorités locales et régionales durant les négociations sur la RRF (Facilité pour la reprise et la résilience), dans lesquelles elles faisaient des propositions d’amélioration du règlement. J’ai répondu positivement à autant d’invitations au dialogue que possible, car je crois sincèrement que vous jouez un rôle essentiel dans la relance économique et sociale post-pandémie.
Mon seul et unique conseil est : NE VOUS ARRÊTEZ PAS. Continuez à faire pression, comme vous l’avez fait avec moi sur plusieurs dossiers. Surveillez l’activité de vos gouvernements nationaux, écrivez-leur, communiquez avec eux, impliquez-vous autant que vous le pouvez.
Dans une lettre envoyée plus tôt cette année par le groupe Renew à la Commission européenne, vous demandiez une meilleure implication des autorités locales et régionales dans la mise en œuvre des plans et leurs éventuelles révisions. Quelle a été la réponse du commissaire Dombrovskis ?
En effet, cette lettre visait avant tout à alerter sur le fait qu’une disposition spécifique du règlement n’était pas mise en œuvre comme elle aurait dû l’être par les autorités nationales. Le vice-président exécutif Dombrovskis a répondu favorablement à notre lettre, et nous avons également eu un dialogue à ce sujet, durant lequel il nous a expliqué les actions de la Commission pour faire respecter cette disposition de la RRF.
À la suite de cette lettre et de nos échanges, la Commission a renforcé ses efforts pour amener les gouvernements nationaux à être plus ouverts, plus transparents et à impliquer davantage les organisations de la société civile ainsi que les collectivités locales et régionales.
La pandémie de Covid-19 a mis entre parenthèses les règles budgétaires de l’UE et donné aux États membres une plus grande flexibilité en matière de dette et de dépenses. Comment concilier un retour à des plafonds budgétaires stricts avec les besoins d’investissement pour une relance verte et durable ?
La rapide évolution de la pandémie a montré qu’il nous fallait une gouvernance économique solide, mais aussi souple, car créer des règles applicables à toutes les situations possibles s’est avéré compliqué, difficile et peu réaliste.
Je pense qu’une fois la crise du COVID-19 terminée, nous devrons nous concentrer sur la réduction des ratios élevés de dette publique, tout en promouvant des finances publiques qui encouragent l’investissement public et privé, couplées à des réformes structurelles.
Nous devrions aussi chercher à renforcer la capacité de réaction des règles budgétaires européennes face aux cycles économiques, et à concevoir un cadre fiscal solide, plus simple et plus transparent.

Conseillère principal – Gouvernance et relations institutionnelles