Séminaire coopération intercommunale (29.09.05): Les collectivités locales critiquent la Commission et la Cour de Justice
Les représentants des collectivités locales européennes et de la Commission européenne se sont retrouvés face à face à l'occasion du séminaire du CCRE sur la coopération intercommunale (Bruxelles, le 29 septembre 2005).
Plus de 80 personnes ont suivi le séminaire, notamment des représentants de villes et municipalités d'Allemagne, France, Grande-Bretagne, Italie, Pologne, Suède, République tchèque, Belgique, Autriche, Grèce, Danemark, Estonie, Slovaquie, Pays-Bas, Chypre, Grand Duché du Luxembourg,…
(Note: liens vers les présentations et documents de référence au bas de la page)
Le secrétaire général du CCRE Jeremy Smith a ouvert la réunion en faisant un tour d'horizon de la situation en matière de coopération intercommunale. Selon lui, les récents arrêts de la Cour de Justice menacent des accords de coopération existant depuis des années entre municipalités. Ces coopérations incluent la fourniture de services, mais aussi le partage de ressources tels des centres d'appels: Nous ne pouvons pas accepter les arguments de la Cour dans les cas "Stadt Halle" et Coname; nous sommes aussi inquiets de l'approche de la Commission qui ne semble pas comprendre les avantages de la coopération intermunicipale.
Jeremy Smith a précisé que le principal problème qui se pose aux villes et municipalités en matière de coopération intercommunale, est la législation communautaire sur les appels d'offres: La législation actuelle ne dit pas clairement si, et dans quels cas, un groupe de municipalités a le droit d'attribuer une tâche à une société publique qu'elles ont créée, ou si, et dans quels cas, elles doivent procéder à des appels d'offres ouverts au secteur privé. Le CCRE estime que les municipalités doivent pouvoir attribuer directement une tâche à une compagnie qu'elles contrôlent conjointement avec d'autres municipalités si cette tâche constitue un service public rendu sur le territoire des municipalités concernées, et si le but premier n'est pas commercial.
Le concept de coopération intercommunale est présent dans toute l'Europe. Avant le séminaire, le CCRE a réalisé une enquête auprès de ses membres. Les conclusions, présentées au séminaire, montrent que la coopération intercommunale existe sous plusieurs formes dans tous les pays européens. La création de coopérations intercommunales n'est sujette à des procédures d'appels d'offres dans aucun pays ayant participé à l'enquête; de même; dans pratiquement aucun de ces pays la présence de capitaux privés est sujette à des appels d'offres préalables.
Les collectivités locales parlent d'une même voix
Des représentants de municipalités européennes ont expliqué le fonctionnement de la coopération intercommunale dans leurs pays respectifs ainsi que l'impact que peuvent avoir la législation communautaire et les décisions de la Cour de Justice.
Le représentant de l'association des villes et municipalités flamandes, Christof Delatter, a appelé la Commission européenne à reconnaître que la coopération intercommunale a une influence positive sur la concurrence. L'existence de sociétés créées par un groupe de municipalités peut inciter les sociétés privées à prendre celles-ci en considération lorsqu'elles répondent à des appels d'offres. Parallèlement, la présence de sociétés privées force les sociétés à capitaux publics à accroître leur efficacité. Malheureusement, quand les municipalités essaient de devenir plus efficaces en créant des sociétés publiques conjointes, la Commission leur impose des règles plus strictes qu'au secteur privé.
Lee Digings, de l'Agence britannique d'amélioration et développement des collectivités locales a mis en exergue la contradiction imposée aux municipalités britanniques: le gouvernement britannique fait pression sur nos municipalités pour qu'elles soient plus efficaces, c'est-à-dire pour qu'elles se regroupent afin d'améliorer leurs services; mais dans le même temps, l'attitude de l'UE n'incite pas les municipalités à se lancer dans de tels regroupements. Toujours selon Lee Digings, le "partenariat public-public" (par opposition au partenariat public-privé) en Grande-Bretagne ne se limite pas aux municipalités entre elles. Ce type de partenariat peut être entre villes et régions ou même entre villes et le gouvernement national. Les participants français ont ajouté que ces coopérations incluant diverses sphères de gouvernance sont courantes en France.
La réponse des institutions européennes
Le représentant de la DG Marché intérieur de la Commission européenne, Robert Wein, n'a pas partagé les vues des représentants locaux; il a déclaré que c'est une erreur de croire que la coopération intercommunale est totalement distincte de la législation sur le marché intérieur: Dans de nombreux cas, les deux concepts se rejoignent. La coopération sans contrat avec rémunération ne tombe pas dans le champ d'application des règles du marché intérieur, mais s'il y a rémunération entre organismes publics, alors la réglementation du marché intérieur s'applique. Il faut faire la distinction entre des activités sous appels d'offres entre organismes publics et les autres formes de coopération intercommunale.
La Cour de Justice était représentée au séminaire par Rita-Maria Kirschbaum. Celle-ci a précisé que de plus en plus souvent, la Commission européenne saisit la Cour de Justice dans des affaires liées aux appels d'offres, même si il n'y a eu aucune plainte de tierces parties.
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Climate, Sustainable Finance Officer