Député européen Sven Giegold: “Les gouvernements locaux font partie du système de gouvernance multi-niveaux de l’UE, contrairement aux lobbyistes ” Depuis plusieurs années, le Conseil des Communes et Régions d’Europe (CCRE) critique vivement le champ d'application du Registre de Transparence, le « registre des lobbyistes de l’Union européenne ». Pour quelle raison ? Les gouvernements des collectivités sont des structures démocratiquement élues et ne doivent pas être assimilées à des lobbies privés. Par conséquent, les collectivités devraient être exemptées d’inscription au Registre de transparence, comme l’affirme le député européen Sven Giegold dans son rapport sur la transparence, la responsabilité et l'intégrité au sein des institutions européennes.
rnA l’heure où la Commission européenne, le Parlement et le Conseil préparent un registre de transparence commun, nous avons interviewé M. Giegold sur l'état d'avancement des négociations ainsi que sur les avantages d'un registre de transparence pour un processus décisionnel plus ouvert et transparent.
Le Parlement européen, la Commission et le Conseil travaillent ensemble à l’élaboration d’un registre de transparence commun à toutes les institutions européennes. Où en sommes-nous dans ce processus ?
rnLe Parlement est sur le point de décider de sa position pour les négociations avec la Commission et le Conseil. La commission des affaires constitutionnelles du Parlement européen (AFCO) m'a demandé fin 2014 de préparer un rapport sur la transparence, la responsabilité et l'intégrité au sein des institutions européennes. Après de longs débats diffusés en direct sur internet le 21 mars 2017, la commission AFCO a adopté ce rapport presque à l’unanimité. Celui-ci comprend de nombreuses propositions pour rendre le registre de transparence obligatoire et plus facile à utiliser pour les citoyens et les lobbyistes.
rnIl y a quelques mois, la Conférence des présidents des groupes politiques du Parlement a nommé deux négociateurs : Sylvie Guillaume et Danuta Hübner. Ensemble, elles ont rédigé un mandat de négociation, assistées par un groupe de représentants de tous les groupes politiques, dont je fais partie. Le projet de mandat est dans l'ordre du jour de la Conférence des présidents du jeudi 11 mai. Les chrétiens-démocrates, les socialistes et les libéraux ont tous insisté sur un processus transparent sur les questions de transparence.
rnLes dirigeants du groupe devront décider s'ils reprennent les propositions adoptées par AFCO ou bien confirment un mandat qui, jusqu'à présent, manque d'ambition. Je ne perds pas espoir. Le mercredi 10 mai, des experts internationaux et des parties prenantes de l'UE ont eu une dernière opportunité pour influencer la décision lors d'une audition publique sur le registre de transparence.
rnDu côté du Conseil, les divergences persistent entre les États membres en faveur de la transparence (POLITICO a souligné la Suède, la Finlande, les Pays-Bas, la France, l'Italie, l'Espagne et la Belgique) et ceux qui sont sceptiques (comme l’Allemagne, la Hongrie, la Pologne, la Grèce, la Slovaquie et le Luxembourg). Le Parlement a appelé à plusieurs reprises le Conseil à s’associer au registre qui, jusqu'à présent, est basé sur un accord interinstitutionnel entre le Parlement et la Commission. Nous espérons que ces négociations commenceront bientôt pour les trois principales institutions de l'UE.
Le CCRE a la conviction que les gouvernements locaux élus démocratiquement et leurs associations ne devraient pas être considérés comme des lobbyistes représentant des intérêts privés. En tant que rapporteur du Parlement européen sur le registre de transparence, pourriez-vous présenter le point de vue du Parlement européen sur ce sujet ?
rnLes élus locaux font partie du système de gouvernance multi-niveaux de l'UE, contrairement aux lobbyistes. En tant que rapporteur, je me suis mis d’accord avec tous les groupes politiques sur cette question. Pourtant, avec une grande influence sur les décisions de l'UE vient une grande responsabilité envers tous les citoyens européens, pas seulement envers ses électeurs. Par conséquent, les représentants locaux devraient également respecter les règles de base d'intégrité.
rnL’un des principes clé est de séparer le pouvoir politique et économique. Ceux qui représentent des intérêts publics et privés, par conséquent, sont des lobbyistes et devraient s'inscrire au registre de transparence. Par exemple, «Frankfurt Main Finance» représente les villes de Francfort et d'Eschborn, l'État allemand de Hesse et, en même temps, les grandes banques. Ils font donc bien entendu partie des organisations devant s’inscrire au Registre.
rnUn autre principe clé qui s’inscrit dans le registre de transparence est de faire en sorte que le lobbying soit transparent, afin que tous les citoyens européens concernés puissent en prendre connaissance. Le registre de l'UE est plus complet et plus proche d'un système obligatoire que dans la plupart des États membres ou dans leurs différents niveaux de gouvernance.
rnLes collectivités territoriales pourraient aussi envisager de faire en sorte que le lobbying au niveau local soit plus transparent. Transparency International a développé LobbyCal, un logiciel gratuit et libre pour rendre cela possible presque sans effort.
rnPar conséquent, AFCO* a déclaré* que les élus locaux ainsi que les représentations des gouvernements locaux, régionaux et nationaux doivent être exclus du Registre lorsqu’ils agissent au service de l'intérêt public, car ils font partie du système de gouvernance multi-niveaux de l'UE.
La Commission européenne et le Parlement européen sont tous deux en faveur d’exempter les gouvernements locaux et leurs associations du registre de transparence. Dans quelle mesure pensez-vous que ce point en particulier sera retenu pendant les négociations interinstitutionnelles?
rnLa demande exacte du paragraphe 25 est l'un des nombreux points pratiques qui n’ont pas été retenus par les principaux négociateurs Guillaume et Hübner. Néanmoins, après la décision à l'unanimité d’AFCO, j’espère que la Commission et le Conseil trouveront un accord sur la formulation du Parlement.
En vue de l’objectif d'un accord interinstitutionnel couvrant les trois institutions, d’après vous, comment est-ce que les procédures législatives du Parlement européen peuvent-elles contribuer à un processus décisionnel plus ouvert et transparent qui respecte le principe de subsidiarité et prenne en compte le point de vue de collectivités européennes?
rnDans mon travail à la Commission des affaires économiques et monétaires du Parlement European (ECON), j'ai souvent observé un déséquilibre entre ceux qui représentent des intérêts privés et ceux qui représentent l'intérêt général. En tant que représentant du groupe politique des Verts, nous nous efforçons de rendre toute l'influence des lobbies plus transparente. Plus le lobbying est transparent, plus les citoyens peuvent appeler leurs représentants à rendre des comptes sur l’inclusion de tous les intérêts, y compris ceux des collectivités territoriales. Au-delà de ça, nous devons fixer des limites à ce que l’argent a le droit d’acheter dans nos démocraties.
Comment les nouveaux accords sur le registre de transparence façonneront ils la perception de l'UE dans les années à venir ?
rnLes citoyens et la société civile exigent plus de transparence. Cela est particulièrement vrai pour l'UE, car les citoyens nous perçoivent comme étant plus éloignés que les gouvernements nationaux et locaux. Internet et la numérisation facilitent la transparence. Les négociations, qui sont sur le point de commencer, détermineront si l'Europe peut être aux commandes et regagner la confiance des citoyens en montrant l’exemple pour d'autres niveaux de gouvernement. Les institutions de l'UE ne doivent pas manquer cette opportunité.
Quelles sont vos aspirations pour l'avenir de l'Europe?
rnPour regagner le soutien des citoyens, nous devons leur donner toutes les chances de s'exprimer sur les décisions politiques. Seule une Europe qui donne plus d’espace à la participation aura un avenir. Si l'UE ne se rapproche pas des citoyens, les populistes de droite profiteront davantage de cette distance. La prise de décision européenne doit devenir plus transparente, en particulier au sein du Conseil de l’UE.
rnLes récentes victoires de mouvements pro-européens comme GroenLinks aux Pays-Bas et celle de Macron en France me rendent plus optimiste. Le gouvernement allemand pourrait commencer par reprendre les propositions pro-européennes de Macron de créer un budget et un ministre des Finances européen pour accompagner la politique de la monnaie commune. Avec un ministre des finances responsable devant le Parlement européen et une alliance avec les parlements nationaux, la zone Euro pourrait se démocratiser.
Climate, Sustainable Finance Officer